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Dangereux les sélecteurs de passage des rapports?

C’est fort possible !

Texte : Denis Duquet

23 décembre 2020

Il y a de fortes chances que vous avez vu soit aux nouvelles télévisées ou sur l’Internet la vidéo de cette dame qui stationne son VUS de luxe, ouvre la portière croyant que la boîte de vitesses est en mode « P ». Malheureusement pour elle, elle n’a pas le temps de fermer la portière que le véhicule est en marche arrière, entraînant celle-ci avec lui. Elle passe finalement sous les roues avant. Le VUS s’immobilise et la dame se relève, pour ensuite s’écouler au sol. Malheureusement pour elle, après deux jours d’hospitalisation, elle décède à l’hôpital des suites de ses blessures.

La famille souligne avec emphase que le constructeur Range Rover a produit un sélecteur de rapports de boîte défectueux et c’est pour cette raison que le véhicule a reculé sans préavis, causant des blessures fatales à la conductrice. Le sélecteur en cause est un bouton rotatif qui a déjà été l’objet de nombreuses critiques de la part d’utilisateurs, et ce sur de nombreux modèles et marques qui font appel à ce système de sélection. Mais avant de s’intéresser plus spécifiquement à ce mécanisme, voyons donc l’évolution des systèmes de choix des vitesses au fil des années depuis l’apparition et la commercialisation des voitures de grande diffusion avec boîte automatique depuis les années 50.

Le levier traditionnel

Avant l’arrivée des boîtes automatiques, la plupart des voitures de l’époque faisaient appel à un levier de sélection des vitesses placé sur la colonne de direction et le mode de sélection en forme de « H » permettait de passer du premier au troisième rapport sans oublier la marche arrière. Lorsque l’automatisation de la boîte de vitesses est arrivée, on a repris la même approche avec un levier de sélection placé sur la colonne, mais au lieu d’effectuer un trajet en forme de H, le déplacement linéaire était de gauche à droite. Et pour savoir quel rapport avait été choisi, un petit tableau doté d’une aiguille informait le conducteur du rapport choisi. C’était simple, passablement efficace. Mais au fil des années, le système de sélection s’usait avec pour inconvénient de devoir s’accommoder d’une sélection des vitesses parfois aléatoires, ce qui pouvait entraîner des surprises.

Les boutons-poussoirs

Bien entendu, les constructeurs automobiles sont toujours à la recherche d’innovations susceptibles de convaincre l’acheteur de choisir un modèle de leur marque. C’est ainsi que chez Chrysler, on a développé un boîtier de sélection doté de boutons-poussoirs qui permettaient de passer les rapports. C’était attrayant, efficace et cela dégageait également la colonne de direction pour y placer les leviers des clignotants et des essuie-glaces. Cependant, il arrivait parfois que l’un de ces boutons se coince, avec des conséquences que l’on devine.

Chez Ford, on avait placé des boutons de sélection des rapports dans le moyeu du volant du Edsel. Là aussi, ça faisait moderne, mais puisque ce modèle a été un échec retentissant, personne d’autre ne s’est intéressé à cette approche.

Le levier au plancher

Parfois, l’histoire se répète. Pendant des années, avec les boîtes manuelles, le passage des rapports était effectué par l’intermédiaire d’un long levier de passage des rapports qui n’était pas nécessairement élégant, mais surtout encombrant. En effet, à cette époque, la majorité des automobiles proposait une banquette pleine largeur permettant d’asseoir trois personnes à l’avant. Bien entendu, la présence d’un levier de vitesses au plancher n’était pas bienvenue. C’est pour cette raison qu’on a accueilli avec enthousiasme le légendaire levier de sélection a course en « H », ce que les Américains appelaient « three on tree , sur la colonne de direction. Mais, avec l’arrivée de modèles plus sportifs dotés de sièges baquets à l’avant, il était possible de placer le levier de sélection entre ces deux sièges. Et puisque l’on avait affaire à ce moment à une boîte automatique, pas besoin de long levier de sélection. On plaçait une console centrale entre les sièges avant et y logeait le levier de sélection. Celui-ci était généralement court, entouré d’une plaque de sélection affichant les rapports proposés. La course allait de l’avant vers l’arrière, avec le mode « P » vers l’avant et finalement la sélection «D » pour la marche avant à l’autre extrémité de la course.

Il faut savoir que la sélection des rapports s’effectuait de façon mécanique : le levier actionnant des tiges reliées à la boîte de vitesses. En général, cette approche était simple et efficace. Il y avait peu de chance de se tromper, mais il était parfois possible de sélectionner la marche arrière au lieu du point mort.

Pour sécuriser la course du levier de sélection, plusieurs constructeurs, Mercedes-Benz et Toyota entre autres, ont développé un parcours cranté du levier de sélection afin d’éviter les méprises.

Les solutions ambiguës

Avec l’évolution des boîtes automatiques à gestion électronique, la sélection des rapports s’est de plus en plus effectuée de façon électronique et souvent par fils. Cela a permis à de nombreux constructeurs de se départir de l’encombrant levier de vitesse central à action mécanique pour le remplacer par un tout petit bidule de contrôle monté sur la colonne de direction. Ce système est loin d’être idéal puisqu’il est parfois difficile de sélectionner la bonne vitesse, il est parfois également facile d’accrocher le levier et d’enclencher le point mort. Il faut parfois tâtonner quelque peu pour trouver la sélection « P » pour immobiliser le véhicule.

Théoriquement, cela réduit l’usure mécanique du processus de sélection les sélections inappropriées suite à une utilisation intensive. On a également jeté son dévolu sur un levier de vitesse central placé entre les sièges, mais là encore, les modes de sélection et de gestion des vitesses par un petit levier à commande électronique n’est pas toujours intuitive et peut causer des surprises aux non-initiés. Pour prévenir les erreurs, surtout lors de la sélection du mode « P » ou « Park », certains constructeurs mettent ce mode à part en faisant appel à un bouton détaché du levier et qui permet de ne pas s’y méprendre.

Les boutons de commande

Jusque-là, on fait appel à des leviers plus ou moins traditionnels, qu’ils soient placés sur la colonne de direction ou sur la console centrale. Mais depuis plusieurs années, , on a développé un système de sélection d’un gros bouton placé lui aussi sur la console centrale. Certains se déploient même lorsqu’on lance le moteur, mais il faut tourner de gauche à droite pour aller du mode « P » pour se déplacer ensuite vers la marche arrière, le point mort et finalement la marche avant. Parmi les avantages, on a bien entendu le dégagement d’espace qui permet d’ajouter d’autres contrôles en périphérie. Par contre, il est parfois difficile de savoir si on a enclenché le bon rapport. Pour compenser, certains constructeurs placent le mode « P » sur le dessus de ce bouton.

Personnellement, j’ai un bémol avec cette approche. Avec le levier plus ou moins conventionnel, si dans le cadre d’une urgence, il faut passer au point mort ou même en marche arrière, Ouch! c’est relativement facile dans la panique d’effectuer la bonne sélection. Avec un gros bouton, il me semble que ça soit plus difficile.

Une autre tendance concernant des commandes non conventionnelles, et l’apparition de plus en plus importante de boutons poussoirs chacun étend identifié clairement. Il suffit alors d’appuyer, selon les besoins, alors ou l’autre pour obtenir le rapport désiré ou le mode de stationnement « P ».

Le frein à main

Suite à l’incident mortel de la dame dont il est fait mention en début de ce texte, nombreux ont été à souligner qu’il fallait toujours enclencher le frein de stationnement avant de quitter son véhicule. Ça peut sembler l’évidence même, mais nombreuses sont les personnes qui ignorent la chose. En se disant que puisque la boîte est automatique, les rapports sont verrouillés en position « P » lorsqu’on quitte le véhicule. C’est vrai pourvu que l’on ait choisi le bon rapport. De nos jours, la grande majorité des voitures modernes applique automatiquement le frein de stationnement qui est presque toujours maintenant à commande électrique. Selon les marques et les modèles, il faut le désengager soi-même avant de prendre la route tandis que sur plusieurs modèles, il se désengage automatiquement lorsqu’on engage un rapport.

Le coupable : la distraction

Les constructeurs auront beau développer toutes sortes de systèmes de passages des rapports, d’engagement automatique du frein de stationnement, il ne pour empêcher certaines personnes de pécher par distraction. Lorsqu’on immobilise la voiture pour la stationner, il faut toujours s’assurer que le levier de vitesses, le bouton de sélection ou toute autre méthode choisie soit bien enclenché à la position « P » et le frein de stationnement engagé.

C’est plus facile à dire qu’à faire, puisqu’au fil des jours, des mois et même des années, on agit souvent par automatisme. Sans se rendre compte que le véhicule est en marche arrière et le frein de stationnement désengagé. De