Revenir au site

Les mécanos. Héros obscurs de la Formule 1

Texte : Denis Duquet

21 septembre 2020

Lorsqu’on visionne une course de Formule 1 à la télé, la caméra nous montre les mécaniciens travaillant fébrilement autour de la voiture, il y a ensuite les changements de pneumatiques qui s’effectuent en un temps record et il y a aussi l’image de ces mêmes mécanos assis patiemment sur des chaises qui semblent peu confortables en attendant la prochaine intervention.

Mais ces images ne nous dévoilent qu’une partie du travail de ces gens. En effet, arrivés au circuit de course, ceux-ci doivent déballer tout le matériel, assembler la voiture, s’assurer que tout est correct et conforme aux spécifications de la voiture elle-même tout en respectant les normes de la FIA.

Mais avant d’arriver sur place, il faut placer tout le matériel et les voitures dans des camions de transport lorsqu’on est sur le continent européen ou dans des conteneurs lorsque les événements se déroulent hors du vieux continent. Somme toute, c’est une tâche ingrate, très exigeante et qui est récompensée en fonction des résultats de la voiture en course. Il ne faut absolument pas que la mécanique fasse défaut en raison de la négligence d’un mécanicien qui n’a pas serré un boulon suffisamment, qui a mal réglé un élément crucial de la voiture.

Il faut souligner que ces techniciens sont des gens fort compétents qui ont le plaisir et l’ingrate tâche de travailler avec les voitures de course les plus sophistiquées de la planète. Et encore, chaque écurie ou en fait chaque voiture possède un mécanicien en chef qui a sous ses ordres des mécanos de la section arrière, d’autres de la section avant tandis que l’électronique et l’hydraulique ont droit à d’autres spécialistes. Cela fait une brigade de plusieurs personnes qui s’affairent comme des abeilles autour de la voiture. Celle-ci est bichonnée, astiquée avant d’entrer en piste.

Et il y a également un aspect qu’il ne faut pas négliger, c’est que leur compétence varie selon la rémunération de chacun. Donc, les écuries de pointe tentent d’embaucher les plus compétents dans le domaine et ils sont payés en conséquence. Moins l’écurie est fortunée, plus il est possible que l’on doive embaucher des personnes qui débutent dans le métier et qui ont nécessairement moins d’expérience. Il ne faut pas sous-estimer la valeur de ces personnes, mais elles doivent faire leurs classes.

Il y a plusieurs années, après avoir remporté le titre mondial avec l’Australien Alan Jones, le grand patron de l’écurie Williams, Frank Williams lui-même, a congédié tous ses mécaniciens. Lorsqu’est venu le temps d’embaucher desm mécanos pour la saison prochaine, les meilleurs éléments avaient été recrutés par d’autres écuries et il a dû se résoudre à devoir compter sur une brigade qui manquait d’expérience. Avec pour résultat, que les deux voitures en piste au cours de la saison suivante ont connu de multiples ennuis mécaniques allant d’un extincteur mal attaché à différentes composantes mécaniques qui ont failli suite à une installation défectueuse.

Et il faut également savoir qu’il y a une hiérarchie chez les mécaniciens en Formule 1. Les plus jeunes sont assignés à des tâches de préparation à l’usine, servent d’éléments de réserve lors des essais hivernaux afin de prendre de l’expérience et ils sont assignés par la suite à des tâches secondaires lors des Grands Prix. Puis, au fur et à mesure, on leur assigne des tâches plus importantes pour devenir ensuite des mécaniciens chevronnés sur lesquels on peut compter. Plusieurs acquièrent également de l’expérience dans des équipes de courses de grand tourisme ou d’endurance. C’est probablement ce qui est le plus similaire au monde de la Formule 1.

Et il ne faut pas oublier les techniciens du fournisseur du groupe propulseur comme ce fut longtemps le cas pour Renault chez Red Bull. Depuis, Honda a remplacé Renault chez cette écurie.

Techniciens Renault chez Red Bull il y a quelques années.

En plus d’un travail stressant, il faut également compter sur les multiples déplacements, les nombreuses heures de travail à la piste et la privation de toute vie familiale pendant la saison des courses alors que les épreuves s’enchaînent souvent les unes après les autres, surtout en cette année de pandémie.

Et comme ça n’était pas suffisant, il faut savoir que la voiture, suite aux qualification, est non seulement passée au crible, mais plusieurs de ses composantes remplacées pour avoir une efficacité optimale le jour de la course. Il faut également savoir que les écuries les mieux nanties sur le plan financier peuvent se permettre de remplacer certains éléments de pointe après chaque journée d’essai et de qualification.

Bref, la vie d’un mécanicien Formule en est une de travail assidu, de responsabilité spécifique en plus de devoir subir une pression constante. Et ceux qui sont assignés au changement de pneus en course sont probablement ceux qui sont le plus stressés de bien faire alors qu’on change parfois quatre pneumatiques en trois secondes et parfois moins. Et ce n’est pas sans risque. Comme ce fut le cas lorsque Räikkönen a heurté un mécano lors d’un arrêt aux puits.

Une victime d'un arrêt aux puit.

Malgré tout cela, pour un mécanicien de course, c’est le summum de pouvoir œuvrer dans une écurie de Formule 1.