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2005 : Baja California en XC70

« El malarrimo » : 595 km d’essai extrême

Texte : Denis Duquet

Photos : Denis Duquet- Bruce Benedict

19 août 2020

Chroniqueur automobile depuis quelques décennies, Denis Duquet a vécu plusieurs expériences mémorables. De celles-ci, cette randonnée mexicaine très spéciale est l’un de ses aventures les plus mémorables.

Photo : Bruce Benedict

En 2005, la compagnie Volvo a décidé de nous convaincre de la solidité, de la robustesse et du caractère passe-partout en conduite hors route de son modèle XC 70 Cross-Country. Lorsque j’ai reçu l’invitation, je croyais qu’il y avait une erreur, puisqu’en réalité, c’était le XC 90 qui était le VUS de la gamme. Quant aux XC 70, c’était une familiale dotée d’un rouage d’entraînement intégral suffisamment robuste pour être soumis à un test plus sévère que la moyenne. Devant mon interrogation, les responsables de la compagnie m’ont affirmé que ce sont surtout les acheteurs de XC 70 qui s’en servent pour s’aventurer hors route tandis que le XC 90 se limitait à être un aventurier urbain.

Notre destination était la péninsule Baja California au Mexique, c’est à cet endroit que se déroule la fameuse course de véhicules tout-terrain et de motocyclettes Baja 1000. Au programme, on devait franchir 595 km rouler sur les mêmes routes que celles empruntées par les compétiteurs de cette course légendaire. Pour ce faire, nous avons volé dans un bimoteur de Phoenix à San Francisquito, le point de départ de notre aventure. Arrivés sur place, nous avons lunché dans une cabane près de la mer au milieu d’une tempête de sable. Malheureusement, les ouvertures de cette cabane n’étaient pas étanches, et nous nous sommes retrouvés avec passablement de sable dans nos assiettes. Quoi qu’il en soit, on était fébrile afin de partir et une armada de onze XC 70 spécialement préparées nous

Photo : Bruce Benedict

Photo : Bruce Benedict

Toutes étaient dotées bien entendu du système Haldex de rouage intégral, de la suspension adaptative Four C, de pneus Pirelli Scorpion S/T 215/65R16, d’un refroidisseur d’huile plus grand et des plaques de protection sous le véhicule.

 

Mais avant de prendre la route, Brian Farnsworth, deux fois du vainqueur du Baja 1000, et responsable de cette aventure nous a mis en garde contre les dangers qui nous attendaient. Notre randonnée s’appelait « El malarrimo »- « Frôler le danger » en français – donc pas question de ne pas respecter les règles. Et on avait pris toutes les précautions possibles, puisque Volvo avait même nolisé un hélicoptère pour rapatrier un ou des blessés en cas de catastrophe. Environ 85 km plus tard, notre convoi arrivait à un hôtel relativement confortable qui avait la qualité de posséder un seul point d’accès à l’Internet et nous nous sommes tous relié pour prendre des nouvelles du reste du monde.

Nous avons découvert que cet hôtel servait de base à une école de pilotage de camionnettes de désert. Lorsque nous avons pris possession de notre voiture, un élève cette école de conduite extrême est venu s’enquérir du pourquoi de notre présence. Lorsque nous lui avons dit que nous allions emprunter la même route que lui, il n’en revenait tout simplement pas. Il nous a regardés comme si nous étions une bande d’illuminés.

Photo : Bruce Benedict

Oups ? Désolé…

Vers huit heures le matin, notre convoi s’engage sur le sentier. Et même celui-ci est relativement accidenté, nous conduisons dans des arroyos qui sont des lits de rivière asséchée, ce qui est quand même convenable en fait de conduite. Et mes premières impressions : cette Volvo se comporte magnifiquement bien compte tenu des circonstances et celle-ci était dotée de la nouvelle suspension Four C à réglage automatique qui est fort efficace et complètement transparente.

 

Nous poursuivons la route au milieu de paysages quasiment lunaires parsemés de quelques cactus et surtout agrémentés d’immenses cailloux. Nous roulons dans un nuage de poussière qui nous oblige à garder nos distances. À l’avant de notre groupe, il y avait quelques journalistes espagnols qui avaient le pied droit passablement pesant. Ils s’étaient distancés de notre groupe et je me suis alors dit : « Denis, tu conduis comme une mauviette. Ce n’est pas le temps de rouler à 70 alors il n’y a pas de limites de vitesse ».

Photo: Bruce Benedict

Photo: Bruce Benedict

Photo: Bruce Benedict

Photo: Bruce Benedict

J’ai alors enfoncé l’accélérateur pour atteindre 100 au compteur, ce qui me semblait une bonne limite compte tenu de la route et du circuit emprunté. Toutefois, lorsque nous avons franchi une bosse, la voiture s’est envolée sur plusieurs mètres. J’ai alors réalisé que la voiture était d’origine américaine et que l’indicateur de vitesse était en milles et non en kilomètres. Donc je roulais allègrement à100 MPH sur un chemin délavé, desséché et particulièrement raboteux. Je me suis aussitôt excusé auprès de Chad Heard, mon copilote et membre des relations publiques de Volvo au Canada.

 

Le parcours a enchaîné les sections désertiques, les arroyos et des routes non pavées en fort mauvais état. Malgré tout, la voiture a tenu le coup sans broncher. En fin de journée, nous arrivons à San Ignacio et j’étais en assez bonne forme, un crédit aux sièges fort confortables.

Mulege, 9 heures plus tard

On nous avait prévenus que cette journée allait être la plus éreintante. Au programme, neuf heures de route. Au début, on retrouve les mêmes routes secondaires défoncées. Puis, on se trouve en plein désert. En fait, nous traversons un immense lac salé. La désolation totale. À l’extrémité de ce lac, nous arrivons à un village, en fait c’était davantage une agglomération de bicoques en contreplaqué. Et en sortie du village, un cube délabré : c’était l’école du village.

L'école du village !!!!

Par la suite, nous avons bifurqué vers l’ouest et nous sommes arrivés dans une région où la forêt était particulièrement dense et l’endroit inquiétant. C’est ainsi que de temps à autre, on voyait des bêtes mortes, dépouillées de leur peau pendues aux arbres. Rien pour nous rassurer.

Et c’est dans ce secteur que nous avons croisé un véhicule de l’armée mexicaine modifié pour accommoder huit soldats assis à l’arrière. Puis au fil des kilomètres, nous les avons croisés à quelques reprises. Nous nous demandions ce que ses soldats pouvaient bien faire dans le coin.

Photo: Bruce Benedict

Photo: Bruce Benedict

Photo: Bruce Benedict

Après une journée passablement éreintante, sommes arrivés à Mulege, au bord de la mer. Nous passons la nuit à l’hôtel La Serenidad, un établissement appartenant à un américain. L’endroit était correct, mais j’ai pris ma douche en compagnie de multiples petits insectes qui avaient choisi ma douche comme logis. Un peu avant le repas, je suis parti prendre une marche en direction du petit aéroport local. C’est là que j’ai rencontré les soldats que nous avions croisés dans la journée et qui bivouaquaient à cet endroit. Plusieurs parlaient anglais et ils m’ont informé du pourquoi de leur présence. Ils m’ont avoué qu’ils étaient là pour nous surveiller et nous protéger en cas d’incident puisque la section que nous avions traversée dans forêt n’était pas tellement commandable. D’ailleurs, un soldat m’a dit : « Laissez votre voiture se dans cette région, revenez 10 minutes plus tard et elle a disparu». Rien de bien rassurant.

Loreto et le retour

Le lendemain, nous avons repris la route en direction de Lareto, notre destination.. Mais cette fois, nous avons parcouru une bonne partie de la distance sur des roues secondaires et même asphaltées. La Volvo s’était révélée passablement confortable sur de très mauvaises routes, mais sur l’asphalte, nous avons été impressionnés par le confort qui nous était offert. En plus, les sièges de notre voiture étaient toujours d’un confort impressionnant.

 

Ce fut le terminal. Loreto est situé sur le bord de la mer et est très pittoresque. Un avion nous attendait. Détail à souligner, l’avion qui allait nous ramener à Phoenix avait transporté d’autres journalistes à cette arrivée au port et ceux-ci faisaient le trajet routier en sens inverse.

Laredo

Aéroport de Lareto

Une preuve irréfutable

En fait, cette randonnée pour le moins très spéciale m’a prouvé qu’il n’est pas nécessaire de se procurer un gros VUS pour aller s’aventurer hors route. J’ai toujours cru et je ne crois toujours qu’une familiale était le compromis idéal entre une berline et un utilitaire sport. Ces XC 70 ont parcouru un trajet très taxant au chapitre de la mécanique, ces voitures ont dû affronter des routes parsemées de cailloux pointus, de nids de poule, de cahots assez impressionnants, et il ne s’est produit aucun incident sur le plan de la mécanique. La seule exception : un pilote trop audacieux a mal jugé sa trajectoire et il a défoncé le radiateur d’huile sur un caillou.

Puis, c’est le retour en avion, un bimoteur de moyenne envergure, pour nous ramener vers Phœnix et le départ pour Montréal lendemain. De toutes les aventures automobiles auxquelles j’ai participé, celle-ci était agréable, spéciale et je recommencerais demain matin même si je ne suis plus la dernière jeunesse.

Album souvenir

Photos : Bruce Benedict