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Mémoires de chars Doubaï. Un étrange salon de l’auto

Texte : Denis Duquet

12 juin 2020

Pendant une carrière qui s'est déroulée sur plusieurs décennies, Denis Duquet a accumulé beaucoup de souvenirs. Cette fois, il nous raconte sa visite au Salon de l'auto de Dubai dans les années 90.

Aujourd’hui, Doubaï est reconnu pour ses nombreux gratte-ciel, dont le plus élevé sur la planète, et pour ces projets pharaoniques. On y brasse de grosses affaires, les produits de luxe sont monnaie courante et cet émirat arabe est devenu l’un des endroits favoris du jet-set international. Mais, cela n’a pas toujours été le cas.

En effet, à la fin des années 80, cet émirat était nettement plus modeste. À titre indicatif, le seul édifice en hauteur était le Centre international qui possédait 12 étages seulement. Et les hôtels étaient relativement modestes sauf quelques exceptions qui étaient fréquentées par les voyageurs internationaux. J’y ai été invité pour assister au Salon de l’auto de Doubaï. Et la raison de mon invitation est assez spécifique. En effet, à cette époque, les dirigeants de la famille Al-Maktoum, qui règne sur cet émirat, voulaient « se mettre sur la map » dans plusieurs activités, notamment une exposition aérienne d’envergure internationale. Et on avait décidé de faire de même dans le secteur de l’automobile.

Dans les deux cas, la recette était assez simple. On invitait une multitude de journalistes provenant de tous les coins de la planète et le tour était joué : le salon de Doubaï devenait une référence internationale. Quant à mon invitation, la compagnie chargée des relations publiques de cet événement ne connaissait pas tous les journalistes de tous les pays. Dans le cas du Canada, on s’est informé auprès des bureaux de General Motors à Doubaï.

Les gens de GM ont consulté la liste des journalistes invités au dernier lancement de presse internationale qui s’était déroulé aux États-Unis. Dans ce cas, les journalistes canadiens n’étaient que des représentants du Québec. La raison ? Comme la délégation canadienne était trop importante pour regrouper tous ces gens-là avec les journalistes américains, on a décidé de déléguer la section québécoise à l’événement international se déroulant deux semaines plus tard à Traverse dans le Michigan. C’est pourquoi mon nom est apparu sur la liste des invitations.

Se rendre à Doubaï représente un long trajet, mais relativement simple. En effet, ce fut Montréal-Londres-Doubaï. Et on y atterrit en pleine nuit, ce qui est assez cocasse. Et lorsque j’ai retiré ma valise du carrousel à bagages, j’ai croisé le représentant en relations publiques de la compagnie Porsche qui se demandait bien ce que je faisais là.

Quant au salon automobile lui-même, c’est assez particulier puisque qu’on y retrouve des véhicules excessivement luxueux, de multiples VUS pour aller circuler dans le désert et quelques voitures plus économiques sans doute destinées aux serviteurs. Et comme cette société ne fait pas grand place à la femme, c’était encore pire cette époque, on ne retrouvait que des hommes à ce salon.

Curieusement, ils étaient tous vêtus de cette longue robe blanche que portent les habitants de ce pays avec une montre Rolex au poignet gauche et un téléphone cellulaire dans la main droite. Ces gens déambulent sans trop se presser. C’est d’autant plus facile à prendre son temps pour examiner les véhicules puisque l’assistance à cet événement est relativement modeste. J’ai rapidement compris que cet événement était pour la gentry et non pas pour la plèbe.

La tradition ne se perd pas.

Curieux détail, il y avait un  kiosque  Harley-Davidson. Ces motos semblent être passablement populaires dans ce coin de la planète. À cette époque, le distributeur de cette marque dans ce coin de la péninsule arabique était un Canadien originaire de Calgary. À une certaine époque, ce mécanicien travaillait dans ses moments libres à réparer et entretenir les motos de cette marque. Et il commandait tellement de pièces de rechange que la compagnie américaine s’est intéressée à lui et lui a demandé s’il ne serait pas intéressé à la représenter. Il a vendu sa maison et  déménagé avec femme et enfant.

Les temps n'ont pas changé

Les organisateurs du salon avaient invité quelques journalistes à effectuer une randonnée dans le désert au volant de plusieurs utilitaires sport de différentes marques. La conduite dans le sable ressemble un peu à la conduite en hiver lorsque la route est recouverte de plusieurs centimètres de neige. Il faut garder l'impulsion et ne pas ralentir faute de quoi on s’ensable. Jacques Bienvenue et moi n’avions aucune difficulté à circuler, mais ce n’était pas le cas par exemple de certains journalistes japonais qui s’enlisaient constamment.

Et pour pimenter le tout, on avait installé une tente en plein centre de nulle part pour nous abriter des rayons du soleil et pouvoir nous restaurer. Puis, une ou deux heures après notre arrivée, nous avons vu apparaître au loin un vieux monsieur monté sur son dromadaire qui est venu nous faire la causette. Curieusement, l’animal semblait allergique aux Asiatiques. En effet, chaque fois qu’un journaliste japonais s’approchait de la bête, celle-ci se mettait à émettre des sons de toutes sortes et l’un d’entre eux en même écopé d’un coup de sabot qui l’a fortement ébranlé.

Puis, après quelques jours de dépaysement, nous sommes repartis en direction de Londres et de Montréal. Périple assez particulier et fort intéressant. Détail en terminant, nous avons pris un taxi pour aller au souk la seconde journée. On nous avait bien averti de négocier la course avant de partir et de respecter les montants qu’on nous avait conseillé de payer. Dans l’auto, c’était une chanson de Céline Dion qui jouait à la radio et une fois rendu au souk aussi bien dans les magasins que dans les allées, c’était encore notre Céline nationale qui chantait.

J’ai assisté dans ma carrière à plusieurs salons automobiles, mais celui-ci était particulièrement différent et fort intéressant.