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Lincoln Corsair

Luxe assuré, héritage nominal douteux

Texte : Denis Duquet

Photos : Denis Duquet, Ford Canada

9 mai 2021

Chez Ford, on a décidé il y a quelques années de permettre à la division Lincoln de renaître de ses cendres. Dans un premier temps, on a créé une identité indépendante et c’est ainsi que Lincoln n’est pas seulement une filiale de Ford, mais une entité autonome. Du moins, c’est ce que l’on tente de nous faire croire. En plus, non seulement on remanie toute la gamme depuis une couple d’années., et à chaque nouveau modèle, l’appellation précédente est abandonnée. On utilisait les lettres MK suivi d’une autre lettre pour désigner le modèle. C’est ainsi qu’on nous a gratifié des  appellations MK C, MK T,  MK Z et MK x. Cette approche n’a pas donné les résultats escomptés alors que les clients n’arrivaient pas à départager les modèles les uns par rapport aux autres. Je ne sais pas quelle sagesse a inspirée les nouvelles nomenclatures, mais c’est ainsi que nous avons dorénavant les modèles Aviator, Nautilus, Navigator et Corsair. Ce dernier modèle étant le plus petit de la gamme . En fait, il s’agit d’une version « linconisé » du Ford Escape et si on peut critiquer cette politique d’emprunt, on peut toujours se consoler alors qu’on a fait appel à un modèle entièrement renouvelé. Quant à l’identification de ce modèle, certains semblent avoir été impressionnés par le nom de Corsair. Personnellement, je crois que c’est particulièrement loufoque même si Ford a puisé dans des modèles antérieurs pour faire appel à ce nom. Pour la petite histoire, soulignons qu’il y a eu le Ford Edsel Corsair, inutile d’en dire davantage, tandis qu’à ma connaissance, la première voiture  à porter ce nom a été le Phantom Corsair 1938. Cette étrange concoction été le fruit de l’initiative de Rust Heinz, héritier de la célèbre famille, qui a concocté cette chose basée sur le châssis d’un modèle Cord. Détail intéressant, les places avant pouvaient accommoder cinq occupants, dont un à la gauche du conducteur ! Après la guerre, le richissime industriel Henry Kaiser qui possédait plus de 100 compagnies avait fabriqué des voitures portant son nom. Pour stimuler les ventes en baisse, il a commercialisé un modèle appelé Henry Corsait. Ce fut catastrophique.

Phantom Corsair 1937

Ford Edsel Corsair 1959

Henry Corsair 1947

Cela prouve qu’il y a des idées parfois bizarres pour identifier des automobiles. Quant à l’appellation Corsair, elle a également été utilisée sur des modèles Ford en Grande-Bretagne et en Australie, mais aucun d’entre eux n’a révolutionné l’histoire de l’automobile.

Présentation réussie

Il n’y a pas si longtemps encore, les stylistes de la marque faisaient appel à une grille de calandre représentant deux sections ovales séparées au centre. Plusieurs soulignaient que c’était une copie de ce que nous proposait et nous propose encore BMW, mais ceux-ci étaient dans l’erreur. En effet, on voulait représenter la grille de calandre utilisée sur les Lincoln d’antan. Mais l’exécution n’était pas convaincante et on a décidé lors de la refonte des premiers modèles arborant la nouvelle philosophie de design d’une grille mettant en proéminence des boutons chromés disposés en forme d’alvéoles, cette grille étant séparée en son centre par un écusson vertical traversant cette calandre de haut en bas. La filiation avec les autres modèles est indéniable. Pour le reste, on fait appel à un toit incliné vers l’arrière, à quelques astuces d’éléments chromés pour dynamiser le tout et vous avez un véhicule qui se distingue passablement des autres de sa catégorie.

Mais la surprise la plus agréable est lorsqu’on prend place à bord. On est confronté avec un intérieur luxueux, faisant appel à une sellerie de cuir fin, à une disposition mariant très bien le noir et le beige. De plus, pour se démarquer de la concurrence, à chaque rayon du volant, des pastilles mobiles permettent de gérer de multiples éléments. Et on n’a reculé devant rien pour intéresser l’acheteur potentiel et divertir les propriétaires. Par exemple, les avertisseurs sonores émettent des tonalités qui ont été enregistrées par l’orchestre symphonique de Détroit. Un de mes voisins, qui a le sens de l’humour, en entendant ces avertisseurs sonores, et apprenant leur origine, a suggéré qu’on aurait peut-être pu s’adresser à la maison de disques Motown ! Quoi qu’il en soit, l’habitacle est luxueux, confortable et d’une excellente insonorisation. Pour ma part, je me suis débattu avec les réglages du siège du conducteur. Ma principale complainte : il était impossible d’abaisser le siège de façon conséquente. J’étais perché trop haut, et il y a fallu que j’ajuste tout le reste en conséquence et malgré mes efforts la position de conduite n’était pas optimale, du moins pour moi. Par contre, aussi bien le passager que les occupants des places arrière n’ont émis aucun commentaire négatif d’autant plus que la banquette arrière offre un excellent dégagement pour les jambes. 

Un autre élément qui m’a fait tiquer au début, c’est l’utilisation de boutons pour gérer la boîte de vitesses à huit rapports. Malgré mes réticences, je me suis rapidement adapté à leurs positions et à leur fonctionnement.

Deux moteurs, un seul choix

L’acheteur se voit confronté à choisir entre deux moteurs quatre cylindres EcoBoost.  Mon véhicule d’essai était propulsé par le moteur 2,0 litres d’une puissance de 250 chevaux et produisant 275 livres pieds de couple. L’autre choix, propose une cylindrée de 2,3 litres et une puissance de 280 chevaux et 310 livres pieds de couple. Dans les deux cas, la boîte automatique à huit rapports est offerte. Il est vrai que le moteur de cylindrée plus importante est plus puissant, mais il coûte plus cher et ses prestations sur la route ne font pas une grande différence. De plus, à l’usage, les performances du moteur de, 2,0 litres laissaient croire aux occupants qu’ il y avait un V6 sous le capot. Si la technologie EcoBoost était plus ou moins mal gérée chez ce constructeur au tout début, on a raffiné son utilisation et la consommation de carburant est plus modeste qu’auparavant e lorsqu’on décide d’appuyer sur l’accélérateur de façon trop intensive. D’ailleurs, la consommation observée lors d’un trajet autoroute, ville et route secondaire m’a permis d’obtenir une consommation de10,0 l/100 km, ce qui est correct pour la catégorie. En fait, le choix de la motorisation dépendra de l’usage anticipé de ce véhicule.

Un seul accroc

En résumé, la conduite du Corsair est gratifiante alors que l’expérience est positive. Malgré que je ne trouvais pas ma position de conduite confortable, c’est quand même agréable de piloter ce VUS. Les prestations du moteur sont intéressantes tandis que la boîte de vitesses à huit rapports ne fait pas nécessairement sentir sa présence. Il est vrai que dénote un certain roulis de caisses dans les virages plus accentués abordés à bonne vitesse, mais la suspension propose un bon rapport confort-tenue de route. Bref, au fil des semaines et même des années, le Corsair devrait satisfaire son propriétaire. En plus, il ne faut pas oublier le luxe de l’habitacle, qui est un élément important pour la catégorie. Et j’allais oublier, la chaîne audio Revel est impressionnante.

Enfin, chaque fois que j’ai fait un essai routier d‘un véhicule de cette marque, il m’arrive toujours un petit pépin. Pas important, mais quand même. La dernière fois, c’était le hayon arrière qui s’était ouvert lorsque je voulais sur l’autoroute. Cette fois-ci, c’est moins spectaculaire, c’est tout simplement que la distance établie entre le véhicule précédent lorsque le régulateur de vitesse intelligent est enclenché, cette distance varie sans mon intervention. Somme toute, le Corsair est sans doute le premier vide véhicule de ce nom à être à la hauteur des attentes et fera oublier son prédécesseur. Mais il faudra bien gérer le choix des options. Le prix de base de mon modèle d’essai était de 50 500$, un prix correct pour la catégorie. Mais avec le jeu des options, le prix final a été de 64 500 $ avant taxes et frais de transport.