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Opinion:

l’après COVID-19 ? Ça va frapper fort !

Par: Denis Duquet

16 avril 2020

En raison de la pandémie qui frappe le monde entier, toutes les activités commerciales et manufacturières sont bouleversées. Les usines d’assemblage automobile sont fermées, les fournisseurs de pièces et d’équipement également sans oublier les concessionnaires qui se contentent d’effectuer des réparations urgentes et d’entretenir les véhicules des services essentiels.

Une fois la pandémie terminée, la remise en marche de cette immense machine, et ce dans tous les pays ne sera pas de tout repos. En effet, il faudra un certain temps avant que les chaînes d’approvisionnement de pièces soient activées, que les usines reprennent le travail et que les voitures sortent enfin de la chaîne de montage. Et encore, il faut espérer que tous les fournisseurs soient encore en affaires.

Mais ça, c’est la partie la plus simple à régler du problème. Par la suite, ces voitures sont destinées à un marché qui sera fortement perturbé. Dans un premier temps, après des semaines sans travail, des millions de personnes n’auront pas les ressources suffisantes pour même songer à se procurer un nouveau véhicule ou, encore, un véhicule d'occasion. De plus, la plupart des constructeurs offrent des périodes de grâce aux propriétaires actuels de véhicules aussi bien au chapitre de la location que du financement, mais une fois le retour à la normale, est-ce que les gens seront en mesure de poursuivre leurs paiements après avoir été presque sans ressources financières pendant des semaines et même des mois. Ils vont devoir régler plusieurs dettes et il se peut que l’automobile soit le dernier de leurs soucis. Mais si la compagnie prêteuse reprend possession des voitures financées, cela ne va faire qu’encombrer un marché.

Marché engorgé: les acheteurs seront-ils au rendez-vous ?

En plus, le marché automobile est en baisse en raison d’un certain ralentissement économique avant la crise de la pandémie et les choses seront loin de s’arranger par la suite. Plusieurs constructeurs étaient déjà en position financière difficile et la plupart devront investir de fortes sommes pour développer des voitures autonomes à propulsion électrique. Ils devront le faire, mais où vont-ils prendre l’argent nécessaire ?

Bien entendu, les personnes qui n’ont pas été affectées par des mises à pied pourront remplacer leur vieux véhicule une fois que les concessionnaires auront ouvert leurs portes à nouveau. Ces personnes seront même en position avantageuse puisque le marché sera un marché d’acheteurs et non de vendeurs. Ce qui signifie que les prix seront sans doute à rabais et qu’il y aura des offres fort alléchantes. En effet, une fois que la production automobile sera à nouveau en marche, il faudra que les véhicules qui sortent des usines soient vendus. Déjà, avec une cessation totale du commerce automobile, les inventaires sont toujours relativement étoffés puisque juste avant la grande fermeture, plusieurs concessionnaires avaient commandé beaucoup de véhicules pour affronter la saison printanière qui est sans doute la plus active du marché automobile. Les gens voulant remplacer leurs voitures esquintées après un hiver toujours difficile pour les véhicules et se procurer une voiture neuve pour passer l’été seront en position de force. Du moins ceux et celles ayant les ressources financières adéquates.

Sans vouloir être trop pessimiste, il est certain que plusieurs constructeurs devront abandonner les modèles non rentables pour se consacrer vers des unités plus lucratives. Et il faut également prévoir que certains concessionnaires ne pourront rouvrir leurs portes, n'ayant plus les ressources financières pour opérer de façon convenable.

Et ce n’est ça ne sera pas la première fois que l’industrie automobile connaisse des difficultés. Ainsi, au début des années 80, une importante crise économique qui avait vu les taux d’intérêt grimper jusqu’à 20 % avait été funeste pour de multiples concessionnaires automobiles. Tant et si bien, que la compagnie Ford avait engagé une personne au Québec pour recruter de futurs concessionnaires puisque plusieurs des concessionnaires affichant l’enseigne bleue avaient décidé de fermer leurs portes et ne plus les ouvrir. Et le séisme économique de 2008 a obligé GM et Chrysler à déposer leur bilan.

C’est une vision passablement négative des choses, mais il s’agit du pire des scénarios. Il se peut également que les multiples aides gouvernementales aux personnes ayant quitté leur emploi leur permettent de ne pas trop s’endetter et de s’en sortir avec un bilan économique relativement équilibré. Ce qui permettrait une saine reprise du marché automobile.

À titre d’information, en Chine, où les mesures de confinement ont été plus ou moins levées, les gens qui peuvent circuler et se procurer des biens de consommation semblent bouder les automobiles qui demeurent dans les salles de démonstration sans trouver beaucoup de preneurs.

On s’en reparle dans quelques mois.