Les choses étaient fortement différentes pour les chroniqueurs automobiles avant la venue de l’Internet, des médias sociaux et des sites Web portant sur l’automobile. Puisque tout ce qui était écrit sur le milieu automobile que ce soit des nouvelles de l’industrie ou un essai routier était publié dans des magazines, des journaux ou des hebdomadaires, il existait à l’époque des embargos qui empêchaient les journalistes de publier la nouvelle avant une certaine heure et une certaine date. En général, cet embargo était d’environ trois semaines histoire de permettre aux publications mensuelles de rédiger la nouvelle et de l’imprimer.
Dodge Aries 1982
Mais tout ça a pris le bord avec l’arrivée de l’Internet. Aujourd’hui, il n’est pas rare de voir un journaliste attablé à l’heure du lunch devant son ordinateur pour rédiger son essai routier qu’il doit envoyer le plus tôt possible afin qu’il soit « en ligne » dans les délais les plus courts. Quant au représentant des magazines, ils ont beau jeu car ils ont parfois une ou deux semaines pour rédiger leur texte, le polir le raffiner. Mais il s’agit d’une espèce en voie de disparition.
Cette époque « pré Internet » incitait les trois constructeurs nord-américains à regrouper les journalistes une fois par année, au mois de juillet en général, pour leur présenter leurs dernières nouveautés et les modèles reconduits. Dans le jargon du métier on appelait ça des « long leads ». C’était donc trois pèlerinages annuels vers les centres d’essai de Chrysler, Ford et General Motors au Michigan. Dans le cas de Chrysler, cela se déroulait à la piste d’essai de Chelsea tout près de Ann Arbor tandis que Ford nous invitait à son centre de développement situé à Romeo en banlieue de Détroit. Finalement, chez GM, l’événement avait lieu dans l’immense complexe situé à Milford à quelques kilomètres de Novi au Michigan. Soulignons que ces centres d’essais et de développement sont situés dans d’immenses domaines qui sont en soi des réserves fauniques puisque la quasi-totalité de l’espace est boisée. Il n’est pas rare de croiser un chevreuil, un renard ou même des dindes sauvages.
Ford Escort 1993
Chez Ford, l’événement durait une seule journée tandis que chez Chrysler, le tout se déroulait en deux jours, le premier étant consacré aux produits Chrysler et Plymouth tandis que la seconde journée était réservée aux produits Dodge et aux camions de la même marque. Chez GM, les présentations se déroulaient toute la semaine, avec une journée par division. Et chaque constructeur nous donnait une documentation plus que complète puisqu’on nous remettait les fiches SAE, pour Society of Automobile Engineer, qui nous donnaient l’information la plus détaillée possible sur tous les modèles. Ces documents de plusieurs pages étaient volumineux et il n’était pas question de prendre l’avion avec tout ce matériel. La plupart des journalistes préféraient donc se rendre à Détroit en automobile, d’autant plus que les déplacements étaient à leurs frais.
Jeep Eagle AWD 1985
Et même si ces présentations avaient lieu en juillet, la plupart des embargos nous empêchaient de publier quoi que ce soit avant la mi-septembre ou encore au début du mois d’octobre. En effet, tout dans l’industrie automobile nord-américaine à cette époque était concentré autour de la première semaine d’octobre. À cette date, on publiait officiellement les photos des nouveautés en plus de la liste de prix et toute autre information pertinente. De nos jours, avec l’arrivée de l’Internet, impossible de faire respecter des embargos de longue durée puisque toute l’industrie carbure au plus rapide, au plus tôt et au plus court. Ce qui oblige naturellement les journalistes assistants au dévoilement de passer la soirée dans leur chambre à tenter de rédiger leur texte le plus rapidement possible c’est la loi du « net » qui le veut. Finalement, le « bon vieux temps » avait plusieurs avantages.