Au cours d’une carrière s’étalant sur plusieurs décennies en tant que chroniqueur automobile, Denis Duquet en a vu de toutes les couleurs. Chaque semaine, il se remémore le passé...
Lorsqu’un constructeur automobile confie une voiture de presse à un journaliste, le but est de permettre à celui-ci d’en faire l’essai afin de transmettre ses impressions et ses critiques à ses lecteurs. Malheureusement, certains membres de la presse spécialisée font un usage outrancier du véhicule qui leur est confié. Et je ne parle pas des demandes de camionnettes à la hausse juste avant le 1er juillet pour permettre aux gens d’utiliser les camions de la flotte de presse pour déménager ses amis ou soi-même. Cela permet tout au moins de vérifier les capacités pratiques de la camionnette. Mais il y en a d’autres qui font un usage que l’on pourrait qualifier d’étrange. Il y a ce journaliste, qui a heureusement quitté la profession, qui avait choisi d’utiliser un Lincoln Town Car pour aller chercher des écorces d’arbres qu’il a empilées sur le siège arrière sans mettre quoi que ce soit pour protéger les tapis et les sièges. Pire encore, lorsqu’il a retourné la voiture chez Ford du Canada, il n’avait même pas pris soin de nettoyer les dégâts. Il a fallu quelques jours aux employés de la compagnie pour nettoyer et même réparer les quelques petites perforations faites sur la banquette arrière.
Lincoln Town Car
Il y a également ce journaliste d’Ontario qui s’est servi d’une voiture de presse pour aller chercher un mouton et quelques poules pour augmenter le cheptel de sa fermette qu’il possédait en banlieue de Toronto. Malheureusement, il n’avait pas de cage ou d’éléments de protection, de sorte que les poules se sont délestées un peu partout à l’arrière tandis que la chèvre avait fortement apprécié le tissu de la banquette et même son rembourrage. Ce même journaliste avait endommagé l’avant d’un véhicule prétextant qu’il avait frappé un raton laveur qui a eu la mauvaise idée de croiser la route devant sa voiture. Mais selon les ingénieurs de General Motors, si c’était un raton laveur, compte-tenu des dommages, l’impact s’était produit à plus de 260 km-heure ! Ou bien l’un animal mesurait environ
1,80 m et pesait 130 kg. Il aurait été plus simple d’avouer avoir frappé un piquet de clôture.
Impact à basse vitesse ?
Non, le raton laveur ne pouvait peser 130 kg !
Il y en a d’autres qui veulent mettre à l’essai de façon assez audacieuse des caractéristiques de la voiture qu’ils ont à l’essai. Une année, Ford avait mis sur le marché une Mercury Topaz quatre roues motrices. Pour s’assurer que le rouage d’entraînement était efficace, un membre de la presse automobile a décidé de foncer dans une congère à plus de 100 km/h afin de voir ce qui allait se passer. Ce fut très simple, il a réussi à tordre les essieux avant suite à l’impact avec la neige durcie, sans oublier un radiateur bousillé.
Pas conçu pour foncer dans les congères ?
Et que dire de ces deux journalistes qui voulaient faire l’essai d’une BMW cabriolet à haute vitesse afin de vérifier le niveau de turbulence dans l’habitacle une fois la capote baissée. Roulant à plus de
190 km/h sur une autoroute californienne, ils ont été rapidement interceptés par la police à moto de cet état, les célèbres CHIP, traduits devant le juge et condamnés à une forte amende en plus d’une interdiction de conduire dans cet état pendant quelques années. Jusque-là pas trop mal. Le pire, c’est que dans le brouhaha de leur arrestation, ils ont oublié de remonter la capote et pendant qu’ils défilaient au tribunal, un violent orage est venu s’abattre sur la pauvre voiture sans aucune protection contre les intempéries. Avec que pour résultat que la BMW à habitacle en cuir a subi des dommages évalués à plus de 8 000 $.
C'était avant l'orage.
Nous sommes loin de l’utilisation du « bon père de famille » que l’on doit respecter lorsqu’un véhicule de presse est prêté aux journalistes.