« Lee » Iacocca est décédé le 2 juillet dernier en Californie. Même s’il s’était retiré des feux de la rampe depuis plusieurs années, il laisse un profond souvenir en raison de ses étincelants états de service. D’ailleurs, il est la seule personne à ce jour, à avoir présidé aux destinées de deux des grands constructeurs américains, soit Ford et Chrysler.
Fils s’immigrants italiens établis en Pennsylvanie, il étudie en génie mécanique à l’université Lehigh en Pennsylvanie pour ensuite obtenir une bourse d’études pour parfaire ses études à l’université Princeton. Ses études terminées, il est engagé par Ford en 1946 en tant qu’ingénieur. Après deux années à occuper ces fonctions, il demande à être muté au département de mise en marché et des ventes. Immédiatement, il connaît des succès dans différentes régions des États-Unis où il est affecté. Ces succès l’amènent à travailler au quartier général de Ford où il progresse rapidement.
Il est responsable du développement de plusieurs voitures, notamment la Pinto, la Mercury Cougar et bien entendu la légendaire Mustang qui a enflammé le marché et créé une nouvelle catégorie de voitures : les « Muscle cars ».
Devenu président de la compagnie Ford et connaissant de grands succès au chapitre des ventes, il est cependant en conflit constant avec Henry Ford II, le grand patron de la compagnie. Une légende veut que dans le cadre d’une de leurs nombreuses discussions animées, Henry Ford II lui a demandé quel était le nom affiché sur l’édifice de la compagnie. Iacocca lui répondit « Ford ». Son patron s’est contenté de lui souligner qu’il aurait toujours raison.
Les rapports se sont envenimés et Iacocca a été remercié de ses services en 1978. Quelques mois plus tard, il était nommé à la direction de Chrysler.
Un sauveur et un innovateur
Lacocca était devenu le grand patron d’un constructeur automobile tout près du dépôt de bilan. Pour éviter la faillite, il convainc le gouvernement américain de lui faire un prêt afin de de sauver les meubles et de relancer la compagnie. Ce ne fut pas chose facile, mais il a eu gain de cause. Incidemment, ce prêt a été remboursé plusieurs années avant son échéance.
Une fois la compagnie de nouveau sur ses rails, il a présidé au développement de nouveaux modèles, notamment les voitures K qui innovaient sur le plan technique pour l’époque et dont le prix de vente était très compétitif. Ce produit arrivait au bon moment, alors que l’Amérique était aux prises avec une sérieuse dépression économique. Ces voitures ont servi de base à de multiples variantes faisant appel à leur plate-forme et à leur mécanique.
Mais le véhicule qui a vraiment permis à Chrysler de progresser sur le plan financier fut l’arrivée de la fourgonnette Autobeaucoup. Avec sa traction avant, sa plate-forme monocoque et une conduite relativement proche de celle d’une berline, cette fourgonnette enflamma le marché. Iacocca s’était laissé convaincre par son collègue Hal Sperlich de commercialiser ce véhicule alors que lorsque les deux étaient chez Ford, ils n’avaient jamais pu concrétiser leurs projets.
Si on lui attribue plusieurs succès au chapitre de modèles qui ont cartonné, il a pris des décisions qui ont été moins heureuses. Suffit de citer le retour du Chrysler Imperial et le Chrysler TC Maserati qui sont des taches à son dossier. Sur la scène européenne, Chrysler s’est également porté acquéreur des marques Simca et Talbot.
Par contre, il a eu la brillante idée d’acheter le constructeur AMC-Jeep-Renault alors que le constructeur français éprouvait de sérieuses difficultés organisationnelles en France. Chrysler pouvait ainsi bénéficier de la grande popularité et du prestige de la marque Jeep.
Il a pris sa retraite en 1992. Il a par la suite investi dans de nouvelles entreprises qui n’ont jamais connu beaucoup de succès et il s’est surtout distingué en étant le grand responsable de la rénovation de la statue de la liberté à New York.
Personnage flamboyant
Non seulement « Lee » Iacocca était doué pour savoir quel modèle il fallait commercialiser, mais c’était un personnage flamboyant qui n’avait jamais peur de dire ce qu’il pensait et qui aimait bien être photographié ou filmé. Que ce soit lors du dévoilement de nouveaux modèles ou l’annonce d’une nouvelle entité commerciale, il faisait accourir les journalistes et les chaînes de nouvelles.
Il était également la grande vedette des publicités télévisées de Chrysler. Il terminait toujours par la même phrase : « Si vous trouvez une meilleure voiture ailleurs, achetez-là ».
À une certaine époque, il a songé à se présenter à la présidence des États-Unis pour ensuite abandonner cette idée.
Il a sans aucun doute été l’un des personnages les plus spectaculaires du monde automobile et l’homme d’affaires le plus en évidence à la fin du XXe siècle.